Ce n’est pas ce que l’on appelle communément un sujet « grand public » : la signature entre le ministre de la santé et l’ensemble des Fédérations hospitalières, publique et privées, d’un protocole pour accompagner la conduite des réformes du financement, n’a pas fait l’ouverture du journal télévisé. Et pourtant, à plusieurs titres, l’acte ainsi posé est important.
Important sur le fond tout d’abord : par cet engagement, le Gouvernement exprime son intention de donner aux établissements de santé une meilleure visibilité sur l’évolution de leurs ressources. Ceci, alors que des réformes vont progressivement se déployer et concerner des secteurs aussi essentiels que les urgences, les soins de suite et la psychiatrie. Leur esprit peut se résumer ainsi : davantage régionaliser les financements, afin de mieux les lier aux caractéristiques des patients pris en charge et aux spécificités des territoires. On mesure combien ce cheminement est exigeant, nécessitant de poser pour tous les acteurs concernés un cadre clair, un accompagnement soutenu, des décisions justes, afin de réussir une démarche qui ne doit avoir qu’une finalité : l’amélioration effective du service rendu aux patients par l’ouverture à de nouveaux horizons du soin.
Un Protocole important aussi, sur la forme et par son esprit : comme pour le Protocole de pluriannualité signé en février 2020, il s’agit d’initier une nouvelle forme de dialogue, plus mature, entre l’Etat et les acteurs de santé, fondée sur la contractualisation autour d’engagements réciproques. Il s’agit aussi d’impulser un pilotage plus moderne des réformes, basé sur le partage des données et une vision prospective des enjeux. Il s’agit, en résumé, de miser sur la confiance et l’intelligence collective !
Un ouvrage récent intitulé « L’Etat qu’il nous faut » donne un mode d’emploi pertinent pour renouveler notre regard sur l’action sur l’Etat. Selon ses auteurs, la vision de la réforme de l’Etat est aujourd’hui trop réductrice, autour de deux paramètres : on fait des économies, et on tente de simplifier. Mais cette approche technique mériterait d’être considérablement enrichie par une vraie réflexion sur « le sens de l’action de l’Etat », réflexion qui doit associer la société civile, les acteurs privés, les associations, les citoyens… Il convient de « remettre de la démocratie et de la politique dans un sujet confisqué par la technique et l’expertise ». Cela passe par l’émergence de lieux de débat, et dans ces temps de doute démocratique, l’enjeu de la réappropriation de la puissance publique par les citoyens n’est sans doute pas à négliger. Le Protocole signé hier est une petite pierre de cet édifice, qui doit tenir ses promesses et être à la hauteur des espoirs suscités.
Source : « L’Etat qu’il nous faut, des relations à nouer dans le nouveau régime climatique »
Romain Baucher, Céline Danion, Daniel Agacinski – Berger-Levrault