La lassitude démocratique saisit tous les pans de la société, et l’enjeu de la santé ne fait pas exception après ces deux années de pandémie. La perte de repères a même conduit certains à fustiger, avec une singulière irresponsabilité, « une dictature sanitaire » qui aurait été instaurée dans notre pays ! Mais au-delà de ces outrances, prédominent un désabusement vis-à-vis de la décision publique et de sa capacité à améliorer vraiment les choses, une fatigue à l’égard de la complexité et de la pesanteur excessives de nos environnements, et des inquiétudes sur nos capacités collectives à relever les défis immenses qui nous attendent.
Pourtant, en santé comme ailleurs, c’est dans la vitalité démocratique que nous puiserons les solutions, à travers trois évolutions essentielles : d’abord, une gouvernance de la santé qui laisse la part belle à de vrais débats de santé publique, ouverts, participatifs, qui mobilisent et engagent la société. Ensuite, l’émergence d’une véritable démocratie territoriale de santé, qui rassemble les acteurs de la santé et du soin autour de la réponse la mieux adaptée aux besoins des citoyens. Abattre les cloisonnements, mieux se connaitre pour mieux travailler, renforcer l’accès aux soins des populations, permettent la cohésion d’un pays. Enfin, consolider la démocratie sanitaire, qui est une vraie force de notre système de santé.
Et cette semaine est d’ailleurs particulière : nous fêtons les 20 ans de la loi Kouchner, loi fondatrice sur les droits des malades et la démocratie sanitaire. La FHP tient à marquer cet anniversaire. Car que de chemin parcouru… mais que de chemin encore à parcourir pour parfaire la reconnaissance de cet édifice, et évoluer, au-delà de la représentation des usagers, vers des patients véritablement acteurs de la transformation du système de santé. L’émergence de formes diverses et renouvelées d’expression de la parole du patient, tendant à favoriser une prise en compte de son savoir expérientiel, est notamment un vrai atout pour faire progresser la qualité et la pertinence des soins.
Ce sont toutes ces facettes de la démocratie en santé qu’il nous revient de défendre, de cultiver et de promouvoir, car elles sont une part, importante, de cette démocratie dont Churchill disait qu’elle était « le pire des régimes, à l’exception de tous les autres ».
Lamine Gharbi