Lors de son discours au soir de sa réélection dimanche dernier, Emmanuel Macron a promis « l’invention collective d’une méthode refondée, pour cinq années de mieux ». Les résultats de la présidentielle n’ont fait que confirmer les profondes lignes de fracture qui traversent la France, et la nécessité impérieuse de redonner des gages d’écoute et de considération à toutes celles et ceux qui se sentent, pour reprendre le titre d’un ouvrage bien connu, « les oubliés de la République ».
Un motif de satisfaction tout d’abord : pendant sa campagne, le nouveau Président a clairement affiché les deux chantiers majeurs de son quinquennat, la santé et l’éducation, et une inflexion dans la conduite de ceux-ci, placée sous le signe d’une concertation accrue. Objectif affiché : « redonner à celles et ceux qui font au quotidien, la possibilité d'adapter les solutions aux réalités de terrain ». Une présidence plus participative donc, avec comme perspective pour la santé une grande « Conférence des parties prenantes », dont les contours demeurent encore flous.
Nous ne pouvons que souscrire à cette exigence, car si la crise sanitaire a donné lieu à une écoute et une considération appuyées du monde de la santé, le retour du business as usual est à craindre. En cause, la gouvernance de la santé dans notre pays, qui indépendamment des qualités des individus qui la composent, cumule de nombreux handicaps : elle est cloisonnée, elle pèche par défaut de lisibilité et de transparence, et surtout elle ne puise pas suffisamment son inspiration et sa vitalité dans le gisement pourtant considérable de créativité et d’initiative des acteurs de terrain. Résultat : des réformes trop souvent décalées des attentes et des besoins, qui peinent à trouver l’adhésion de celles et ceux à qui elles sont censées s’appliquer.
Or les femmes et les hommes engagés pour la santé et le soin sont comme tous les citoyens : ils ont besoin, et peut-être plus que jamais depuis la pandémie, de vision, de concertation et de sens. Il est donc fondamental de raviver la relation de confiance qui a pris forme dans la lutte contre le virus, et de donner de la substance à cette « nouvelle méthode » que notre Président de la République appelle de ses vœux.
Matérialisation de cette volonté, la Conférence des parties prenantes est attendue avec un mélange d’espoir et de scepticisme. Emmanuel Macron le sait parfaitement, un exercice participatif est un processus complexe et exigeant, qui ne peut se permettre de décevoir : les défis sont trop importants, et les attentes trop impérieuses. Surtout, un tel exercice doit associer vraiment, comme son nom l’indique, toutes les parties prenantes. Lors du Ségur, on a décliné pour le secteur privé les mesures prises pour le public. C’est bien, mais il faut maintenant réfléchir et travailler pour tous et avec tous : c’est cela, l’essence même d’une « nouvelle méthode ».