Nous sommes toujours en attente de la fumée blanche quant à l’identité du, ou de la, ministre de la Santé du futur Gouvernement. Notre Fédération hospitalière, interlocutrice quotidienne de la puissance publique, sera très attentive au choix arrêté et plus soucieuse que jamais d’entretenir des relations constructives et de confiance avec ses nouveaux interlocuteurs.
Nous avons, évidemment, des sujets urgents dont le ministre doit s’emparer dès son arrivée. Je pense notamment à la pénurie d’infirmiers et d’aides-soignants dans les établissements de santé. Mais la réussite de toute action politique est étroitement conditionnée à trois critères : la gouvernance, la méthode et la capacité d’intégrer le temps long. Et sur ces points, il y a de grandes marges de progrès.
La gouvernance de notre système de santé doit être rénovée. Cela nécessite un fort volontarisme politique, pour remédier aux effets délétères conjugués de la multiplicité et du cloisonnement des administrations et des instances. Il en découle un phénomène singulier, celui d’une structuration de la gouvernance à rebours de l’esprit même des transformations que celle-ci souhaite impulser ! Compliqué, dans un tel contexte, de faire travailler ensemble les acteurs de santé et de soin au service des patients et de leur parcours…
La méthode de conduite des réformes doit être revue en profondeur, sous plusieurs angles. D’abord, en conciliant le « faire » et le « faire-savoir », grâce à une vraie pédagogie de la réforme qui permette à la société de prendre la mesure des avancées. Reconnaissons que cette pédagogie n’est pas toujours au rendez-vous, et que le sens de l’action de l’Etat échappe beaucoup trop à nos concitoyens. Cela n’est pas sans conséquence dans les urnes. Ensuite, en créant toutes les conditions favorables à l’adhésion des acteurs concernés, grâce à une concertation qui, sauf à être un simulacre, doit répondre à plusieurs exigences : la confiance, la transparence sur les informations, la visibilité des impacts, et surtout l’adéquation par rapport à la réalité du terrain. Vaste programme… mais c’est l’unique voie de progrès.
Enfin, dernier critère absolu de réussite, l’intégration du temps long et de la transversalité des enjeux, indispensables dans le domaine de la santé, alors même que nos réflexes politiques, notre fonctionnement institutionnel et notre culture administrative ne nous y prédisposent guère. Visibilité des ressources financières sur plusieurs années, impulsion d’une dynamique de santé publique intégrant l’alerte écologique, intégration de la prospective en santé comme impératif stratégique, anticipation des crises à venir alors que tout le discours public aujourd’hui parait avoir occulté la pandémie… Cette intégration du temps long nécessite du courage car elle est parfois peu compatible avec le calendrier politique, mais elle est indispensable pour embarquer les citoyennes et les citoyennes autour de perspectives porteuses d’espoir.