Dans le Baromètre de la Confiance du CEVIPOF publié en début d’année, les Françaises et les Français plébiscitent la santé/science/sécurité sociale, l’éducation et l’armée/police. Soin, protection et proximité, tel est donc le trio gagnant pour être assurés de la confiance des citoyens, dans une société qui ne croit pourtant plus en grand-chose. Il suffit pour s’en persuader de regarder les résultats des élections de dimanche dernier, marqués par une abstention record pour un premier tour de législatives : plus de la moitié des électeurs ne se sont pas déplacés. La « grande démission » est sans doute avant tout… une démission démocratique.
Santé, éducation, sécurité : trois piliers de notre pacte républicain, et pourtant… la confiance dont ils sont crédités est inversement proportionnelle à leur attractivité. En lisant la semaine dernière l’interview d’un ancien haut fonctionnaire du ministère de l’Education sur la pénurie d’enseignants, je n’ai pu m’empêcher de faire un parallèle avec la pénurie de professionnels de santé.
Il évoque dans cet article « une baisse catastrophique du nombre de professeurs ces dernières années », « beaucoup de pression, des métiers dévalorisés, et un défaut d’anticipation de la situation ». Et de conclure : « Cela prend une telle ampleur qu’il faut sonner l’alerte. La système éducatif français va être en difficulté si on ne parvient pas à améliorer la situation. C’est le premier dossier que le ministre de l’éducation va trouver sur sa table ». Remplacez éducation par santé, et il n'y a pas une virgule à changer au constat.
Il ne s’agit pas de faire des raccourcis hâtifs. Il s’agit en revanche de dire qu’il n’est pas possible de laisser dans un tel état de dégradation ces piliers de notre pacte républicain, rares acteurs crédités de la confiance citoyenne. Dans le champ de la santé, ce sujet des pénuries de professionnels, des voies pour redonner de l’attractivité aux métiers du soin, de l’anticipation des professions de demain, est à traiter de toute urgence.
Il faut parler salaires bien sûr, mais pas seulement : il est aussi question de formation, de fluidité des carrières, de décloisonnement des parcours, de considération, de reconnaissance… voire de respect ! D’ailleurs, encore une fois sans faire de caricature, ce n’est peut-être pas un hasard si les soignants, les enseignants et les policiers sont trop souvent en butte à ce que l’on nomme de manière euphémistique des « incivilités », qui minent leur exercice.
Un sursaut s’impose donc sur ces enjeux fondamentaux, qui conditionnent la façon dont nous serons soignés, éduqués, protégés demain. Au-delà des sujets concernés, ce sera aussi un sursaut salutaire plus général pour remédier à la lassitude démocratique intense qui s’est emparée de notre société depuis trop longtemps.
Lamine Gharbi